La réalité du grand gala taurin de Béziers…
Opposée aux corridas par principe, j’ai voulu voir de mes yeux ce spectacle si controversé. J’ai vu des taurillons malingres hésiter à sortir du toril puis s’élancer, de façon irrégulière, manifestement affolés; des taureaux plus imposants courir avec fougue mais souvent, ils trébuchaient, désorientés par le jeu des capes.
Et puis la torture, la barbarie…
La pique qui, sous le poids de l’homme à cheval, s’enfonce tout contre la colonne vertébrale; les banderilles, harpons d’acier lancés dans la chair vivante ; l’épée du matador qui transperce le corps épuisé, immobile. J’ai entendu un taureau beugler de douleur et de détresse. Après l’estocade, alors qu’il vacille, les hommes l’encerclent, lui courent autour et le fouettent avec leur cape pour le déséquilibrer. A terre, il est achevé à coups de poignard, puis immédiatement mutilé. Un taureau bougeait encore alors qu’on lui coupait une oreille.
Je n’ai rien vu de beau ou de courageux, je n’ai même pas vu de combat. Juste l’exécution méthodique par plusieurs hommes d’un animal acculé, leurré et incité à charger une étoffe. Comme le puntillero qui a poignardé, ou l’homme qui a enchaîné les cornes des dépouilles à l’arrastre pour leur sortie de piste, ils ont agi avec froideur et inhumanité.
L’arrogance, la suffisance des toreros fiers de tuer, est indécente et immorale. Les supplices que j’ai vus, les tortures, les mises à mort, les mutilations, des enfants très jeunes présents dans les gradins les ont vus aussi. Est-ce acceptable ?
La seule vision qui m’a réjouie est celle des gradins quasiment vides. Tellement vides qu’il est légitime de se demander si Béziers est encore une ville taurine !
Sophie Maffre-Baugé