Même à Nîmes, les corridas, loin d’être une affaire juteuse, sont généralement déficitaires comme l’a montré, entre autres, en 1998, une expertise financière commandée par la mairie nîmoise (Midi Libre du 11.10.1998). Les arènes de Nîmes ont pourtant une réputation internationale et une capacité d’accueil (14.000 places) qui permettent de rentabiliser des spectacles coûteux. On imagine l’ampleur du déficit dans les arènes de moindre catégorie.
En général, ce sont des mairies qui organisent les corridas en France, sur fonds publics et ce sont donc les contribuables, majoritairement anticorrida, qui paient le déficit. Est-ce tolérable ? Il arrive que les spectacles soient organisés à ses frais par un club taurin (à Céret par exemple) ou par un entrepreneur privé (exemple de Robert Margé à Béziers). Même dans ces cas, les spectacles sont largement financés sur fonds publics :
A/ À Béziers où les arènes sont propriété privée et où les corridas sont l’œuvre d’une entreprise privée, la municipalité, et donc l’argent public, finance la publicité tauromachique.
B/ D’après la revue aficionada » Tendito » , il n’existe pas plus de 5 000 aficionados dans toute la France. Ajoutons-y quelques milliers de personnes qui vont aux arènes par curiosité, snobisme ou habitude. Dix mille amateurs, vrais ou faux, c’est bien peu pour toute la France. Aussi, pour réunir plusieurs milliers de spectateurs à une corrida il faut les faire venir de tout l’hexagone. Or, ces amateurs, moins passionnés qu’on ne le dit, n’acceptent pas de faire des centaines de kilomètres uniquement pour assister à des corridas. Pour les déplacer, il faut, hors des arènes, toute une feria, c’est-à-dire une grande fête de plusieurs jours offrant de nombreuses attractions (concerts de rue, village équestre, expositions, etc.) gratuites pour les visiteurs parce que payées par le contribuable. Sans ferias, les matadors les plus célèbres se produiraient devant des gradins presque vides. Si des corridas peuvent avoir lieu, c’est donc grâce aux ferias financées par les contribuables presque tous indifférents ou hostiles aux corridas.
C/ Que dire des écoles de tauromachie (Nîmes, Arles, Béziers, etc.) où on apprend à des enfants dès le plus jeune âge à torturer et à tuer ? Ces écoles inqualifiables, condamnées par l’opinion publique, ne vivent pourtant que de fonds publics versés par des mairies, par des Conseils Généraux, parfois par le Conseil Régional.
D/ La Chambre Régionale des Comptes a publié en 1997 un rapport sur les malversations commises par la mairie de Nîmes dans la gestion des spectacles taurins. Ces pratiques scandaleuses ne sont pas limitées à Nîmes comme le montre le rapport d’étape sur la filière taurine publié la même année par le Conseil économique et social régional. Éleveurs de taureaux, toreros, torobusinessmen et certains élus des villes taurines s’entendent pour noyer dans d’épaisses ténèbres les opérations financières auxquelles ferias et corridas donnent lieu. Le conseil économique et social régional, n’ayant pu obtenir de chiffres ni sur le prix des taureaux vendus aux mairies , ni sur les rémunérations versées par les mairies aux toreros, est contraint de conclure : » La transparence n’est pas, dans ces milieux, une vertu cardinale. «
Et ce n’est pas nous mais la revue tauromachique » Toros » qui, dans son numéro 1569 ( 2 janvier 1998), écrit :
» Tous les clubs taurins et revues taurines réclament régulièrement depuis des années la publication au moins annuelle des comptes des arènes. Ils n’obtiennent jamais aucune réponse claire… Il est absolument anormal, quand la gestion d’une arène est faite sur le mode public municipal, qu’il n’en soit jamais rendu compte aux habitants de la commune comme dans les autres matières. Que craint-on si on n’a rien à cacher ? « .