1- DEFINITIONS
En latin classique le nom FERIAE désigne les jours de fête et de repos. De là vient l’expression française « jours fériés ».
En latin tardif FERIA (au singulier) désigne le marché organisé un jour de fête. Ce nom est devenu en vieux français feire puis foire.
Le nom latin FERIA est passé sans altération en espagnol où il désignait autrefois le grand marché organisé à l’occasion de la fête annuelle du saint patron local : feria de san Isidro (Madrid), feria de san Fermin (Pampelune) etc. La conjonction d’une fête annuelle et d’un marché extraordinaire attirait une foule immense venue de loin pour vendre, acheter, échanger des nouvelles, faire des rencontres et se divertir. A la fête religieuse s’ajoutaient des réjouissances profanes: chanteurs, musiciens, comédiens, bouffons, montreurs d’animaux savants et autres professionnels du spectacle profitaient de ces grands rassemblements commerciaux et festifs où ils étaient assurés de ne pas manquer de spectateurs. Pour cette raison les professionnels de la tauromachie prirent l’habitude d’organiser des corridas à chaque feria.
Ainsi, dans l’Espagne d’autrefois, ce n’était pas la corrida qui faisait naître une feria. C’était au contraire le grand rendez-vous religieux, festif et commercial qui faisait vivre la corrida en lui procurant les spectateurs que la corrida était incapable de déplacer par ses propres attraits.
Au 19ème siècle la révolution industrielle, l’explosion des transports et l’exode rural facilitent les échanges commerciaux qui deviennent quotidiens. Foires françaises et ferias espagnoles perdent leur fonction commerciale. En France les foires disparaissent presque toutes. En Espagne, les ferias se réduisent à leur fonction festive.
Aujourd’hui en Espagne, même dans les villes les plus taurines (Madrid, Séville, Bilbao) il est impossible, faute de spectateurs, de rentabiliser une corrida isolée, organisée en dehors d’une feria. Seul le grand rassemblement festif d’une feria est capable d’attirer une foule suffisante pour remplir plus ou moins une arène.
Il est faux qu’une feria ait besoin de corrida.
C’est au contraire la corrida qui ne survit que grâce aux ferias.
2- APPARITION DES FERIAS FRANCAISES
Ayant remarqué que l’Espagne (à la seule exception de Barcelone) ne donne pas de corrida en dehors d’une feria, les organisateurs français, pour attirer du monde aux arènes, ont imaginé d’organiser, sous le nom espagnol de « feria », une grande fête municipale autour des corridas (alors qu’en Espagne, c’est la corrida qui se greffe sur une feria préexistante). En 1952 est organisée à Nîmes la première feria française. La première feria biterroise a lieu en 1968.
A Béziers comme à Nîmes, à Arles et partout, une « feria » française est une grande fête municipale qui dure plusieurs jours. Spectacles équestres, lâchers de taureaux dans les rues, concerts de rue et autres attractions, gratuits pour les touristes parce que payés par les contribuables, attirent une foule considérable: plus de 200.000 visiteurs certains soirs, d’après la mairie de Béziers. Evaluation excessive qui additionne notamment Biterrois et touristes. Un million de visiteurs en tout sur l’ensemble de la feria prétend la mairie. C’est un mensonge pur et simple qui compte plusieurs fois les mêmes personnes quand elles participent plusieurs jours de suite à la feria. Mais il est vraisemblable que la population de Béziers (75.000 habitants) est portée au double ou même davantage certaines nuits de feria. Ce qui pose d’énormes problèmes de circulation, de stationnement, de sécurité et d’hygiène (voir ci-dessous). Dès 1990, alors que l’estimation officielle n’était que de 100.000 visiteurs maxi par nuit de feria, le commissaire Carton, inquiet, conseillait de ne pas aller plus loin dans la démesure. Il n’a pas été entendu…
3- L’IMPOSTURE CULTURELLE
Pour attirer les touristes amateurs de corridas, généralement friands d’exotisme et de Sud ardent, on déguise Béziers l’occitane en une prétendue cité andalouse. Pendant des années le slogan officiel, répété à satiété, fut que Béziers était la Séville française. On prodigue aux touristes flamenco, sévillane, paso doble, paella, sangria pour les dissuader d’aller chercher en Espagne cette corrida exotique et barbare qu’on tente de leur vendre ici.
Cette mascarade se fait au détriment de la culture véritable de Béziers qui est historiquement le cœur de l’Occitanie. Autrefois capitale non seulement viticole mais aussi industrielle de tout le Languedoc, Béziers a été un exemple de prospérité. Pour évoquer une très grosse somme on disait: « Il te faudrait tout l’argent de Béziers ». Puis cette ville a vu péricliter son industrie et sa viticulture. Mais Béziers reste une forteresse (reconnue comme telle) de la culture occitane. C’est Béziers qui opposa en 1209 la résistance la plus héroïque et la plus célèbre aux armées du Nord commandées par Simon de Montfort. C’est à Béziers que tout le Midi est venu manifester le 17/03/07 pour défendre la langue occitane. C’est à Béziers que se trouve aujourd’hui le CIRDOC, le centre interrégional de documentation occitane, la plus grande médiathèque occitane du monde qui, à elle seule, ferait de Béziers le coeur de l’Occitanie. Cette ville pourrait, devrait, toute l’année, être la vitrine de la culture occitane. Béziers est aussi une des plus vieilles agglomérations d’Europe. Successivement habitat préhistorique, ville gauloise, cité grecque, oppidum gallo-romain, bourg médiéval et enfin capitale économique et culturelle de l’Occitanie, Béziers pourrait, devrait, toute l’année, être un haut lieu du tourisme archéologique, historique et culturel. Au lieu de valoriser touristiquement 365 jours par an cet exceptionnel patrimoine, la mairie préfère le cacher et déguiser Béziers, 4 ou 5 jours par an, en fausse ville andalouse, en abattoir taurin pour y attirer des sadiques amateurs de corrida, de violence et de sang.
4- L’HYGIENE DES GARGOTIERS
Le modèle implicite de la feria biterroise, c’est la feria de Séville avec son célèbre « campo de feria ». On appelle ainsi un village de tentes dressé pour la durée de la feria et dans lequel clubs taurins, associations et riches notables donnent des réceptions pour des invités triés sur le volet. On y rivalise d’élégance et de mondanité.
Pour imiter Séville la mairie dresse et loue des « casitas » (tentes) à tous ceux qui souhaitent gagner de l’argent en vendant aux touristes des nourritures et des boissons allant du médiocre au vomitif. Ces gargotiers occasionnels cuisinent avec des moyens de fortune et ne sont pas équipés pour respecter les règles élémentaires de propreté et d’hygiène. Les casitas ne sont pas raccordées au réseau d’égout pour l’évacuation de leurs eaux usées qui se répandent sur le sol. Les cuisiniers et les serveurs n’ont parfois même pas de quoi laver la vaisselle. Les services compétents de la préfecture font bien des inspections mais ont apparemment consigne d’être très indulgents puisqu’ils n’épinglent que les abus extrêmes: aliments avariés surtout…
5- LA BACCHANALE
Un cafetier professionnel, quand un client frôle l’ivresse, refuse de lui verser encore à boire. Un professionnel a une réputation à défendre et une clientèle d’habitués à protéger contre les dérapages d’un ivrogne qui devient agressif, incivil, vomit, etc. Les gargotiers occasionnels qui s’installent sous une tente ou sur un trottoir pendant la feria n’ont, eux, aucun de ces scrupules. Ils sont là pour se remplir les poches au maximum en 4 nuits et ne refusent jamais de verser de l’alcool à ceux qui ont déjà trop bu.
Le groupe Paul Ricard, dont les excès publicitaires ont été réprimés dans certaines boîtes de nuit, peut, pendant la feria, en toute impunité, franchir la ligne jaune : ses jolies ambassadrices, une sulfateuse sur le dos, versent du pastis dans tous les verres vides qu’elles rencontrent. Les jeunes, qui n’ont pas besoin d’incitation adulte pour s’enivrer, sont excités par l’orgie ambiante à se saouler et y prennent le goût et l’habitude de l’alcool.
Au cœur de la nuit c’est par dizaine de milliers qu’on compte les férieurs pleins comme des outres, titubant et zigzaguant ou couchés sur le sol, ivres morts.
L’abus d’alcool favorise l’inconduite : des milliers de buveurs évacuent le trop plein en urinant contre les façades des prestigieuses allées Paul Riquet et plus encore dans les rues moins réputées. La rue de Carles, obscure et peu fréquentée, est, pendant la feria, appelée par les riverains la rue Pipicaca. D’autres buveurs vomissent n’importe où un mélange de daube de taureau, de paella et de sangria. Quand la fête se termine vers 3 ou 4 h du matin, si vous passez par là, vous ne savez où poser les pieds pour ne pas salir vos semelles et vous devez vous boucher les narines. Quelle image les organisateurs donnent-ils de Béziers et des Biterrois?
Vers 3 ou 4 h du matin, les rues en fête sont dans un tel état que le service de nettoiement, à partir de 5 h du matin, doit effectuer 3 nettoyages successifs: un ramassage d’ordures d’abord, un lavage des rues et des trottoirs ensuite, un épandage de désodorisant enfin pour couvrir les tenaces puanteurs de vomi et d’urine.
L’alcool favorise agressivité, insultes, propos outranciers, bagarres, vandalisme et transgressions sexuelles.
Les voleurs à la tire profitent de la cohue, des bousculades, du bruit et de l’ivresse pour prélever portefeuilles et argent dans les poches de leurs victimes.
A Nîmes police et gendarmerie opèrent ouvertement de nombreux contrôles d’alcoolémie aux sorties de la feria, évitant ainsi des accidents de la circulation. A Arles des dispositions sont prises pour reconduire chez eux les fêtards éméchés. A Béziers rien de tel. Dans les bilans officiels publiés après chaque feria les contrôles d’alcoolémie et les accidents provoqués par les automobilistes ivres ne sont même pas évoqués. La mairie veut que les fêtards dépensent à Béziers le plus d’argent possible. Il est donc hors de question pour elle de limiter la consommation d’alcool. Elle obtient apparemment des services de l’Etat les complicités nécessaires.
6- TAPAGE NOCTURNE
Le tapage nocturne est interdit et puni par la loi. Mais dans ce domaine comme dans d’autres la toromafia est au-dessus des lois. Bodegas et casitas rivalisent de décibels pour couvrir la musique des autres et attirer la clientèle. Le bruit est tel qu’il est impossible de causer avec les personnes qui vous accompagnent. Le seuil de danger (90 décibels) est presque partout dépassé. La mairie feint de déplorer cet abus mais se garde bien d’y mettre un terme. Le bruit, comme l’alcool et la violence, fait partie de la défonce que beaucoup de fêtards mal dans leur peau viennent chercher à la feria.
Chaque nuit la feria se termine officiellement à 3 h du matin et une patrouille oblige les bodegas et casitas à fermer boutique. Mais il faut du temps pour aller partout et convaincre les récalcitrants. Cette tournée de fermeture ne se termine que vers 4 ou 5 h du matin. Après quoi aux musiques déchaînées succèdent les cris et chants d’ivrognes voulant poursuivre la fête ou cherchant leur voiture parce qu’ils ont oublié où ils l’ont garée. Pour les infortunés habitants des rues en fête, pendant 4 ou 5 nuits il est impossible de dormir. Intolérable quand on doit se lever tôt le matin pour aller travailler. Mais bien peu osent se plaindre. Beaucoup d’habitants du vieux centre, malgré la modicité de leurs revenus, choisissent de fuir Béziers pendant ces nuits d’ excès et sont ainsi contraints de dépenser ailleurs plus que ce qu’ils auraient dépensé à Béziers.
7- CIRCULATION ET STATIONNEMENT
Stationnement et circulation sont interdits dans le centre ville en fête non seulement pendant toute la feria mais aussi une semaine avant et plusieurs jours après pour faciliter le montage puis le démontage des casitas, podiums et autres installations. La complexité des arrêtés municipaux promulgués à cette occasion est telle que même des automobilistes cultivés ne comprennent pas tout, en oublient une partie, confondent dates ou heures, contreviennent sans le savoir à ces arrêtés et se font sanctionner par mise en fourrière de leur véhicule.
Insolubles deviennent les problèmes de stationnement dans toute la ville quand le soir tombe : comme la population de Béziers double ou triple pendant la feria, le stationnement, déjà difficile en temps ordinaire, devient un casse-tête les soirs de feria, d’abord autour du centre ville puis de plus en plus loin du centre à mesure que les heures passent, que les fêtards affluent et que la ville s’engorge avec des trottoirs entièrement occupés des 2 côtés par 2 files continues d’autos en stationnement.
8- COUT ET RETOMBEES DE LA FERIA
Le coût de la feria pour les contribuables est de plus en plus élevé.
3,5 millions de francs assurait la Mairie en 1993.
6 millions de francs en 2001.
1 millions d’euros en 2006. Le quart de cette somme serait consacré au nettoiement, ce qui révèle l’ampleur des dégâts commis par les hordes de fêtards.
A titre de comparaison la mairie de Nîmes, pour la Pentecôte (la plus grande de ses ferias annuelles et la plus grande des ferias françaises) annonçait en 2005 un investissement de six cent mille euros, donc inférieur à celui de Béziers.
Quelles sont les retombées de cet investissement ?
La mairie de Nîmes évaluait à 30 millions d’euros en 2003 et à 40 millions d’euros en 2005 la somme dépensée par les fêtards dans les commerces nîmois pendant la feria de Pentecôte.
A Béziers la Mairie ne craint pas d’exagérer. Les retombées de la feria biterroise sur le commerce local étaient évaluées le 18/08/00 à 500 millions de francs puis seulement à plusieurs dizaines de millions de francs le 10/08/01 (Midi libre).
« Enorme », « On n’ose imaginer ce que serait pour l’économie biterroise une année sans feria !» assure le Maire de Béziers. Dans le « journal de Béziers » de septembre 2006, page 3, il assure que, pour un investissement municipal de 1 million d’euros, la feria 2006 a valu « au commerce biterrois un revenu cent fois supérieur et peut-être plus. » Mais un peu plus loin, page 14, le maire, ayant apparemment oublié ce qu’il a écrit à la page 3, ramène à quelques dizaines de millions d’euros la somme dépensée par les fêtards.
On ne peut guère se fier à des évaluations officielles aussi dépourvues de rigueur. D’ailleurs, si le rendement économique de la feria était aussi élevé que le prétend la mairie, pourquoi ne pas organiser plusieurs ferias par an, quitte à demander une participation financière à la chambre de commerce et aux entreprises bénéficiaires ? Robert Margé, ne parvenant pas, faute de public, à rentabiliser ses corridas de juillet, a instamment demandé à la Mairie de lui organiser une 2ème feria en juillet. La réponse officielle de la Mairie a été que l’investissement municipal nécessaire à une feria était trop lourd pour être consenti 2 fois par an.
Remarquons aussi que la feria est toujours fixée à la mi-août, c’est à dire à la période où le littoral et les installations touristiques sont déjà saturés. La feria ne peut apporter aucun plus à des campings, des hôtels déjà archi-pleins début août. Pour être profitable à l’économie locale, il faudrait que la feria ait lieu à une autre date. Mais la feria est incapable de faire venir à Béziers pour 5 jours des Parisiens ou des Lyonnais. Elle est seulement capable de rassembler le soir, pour quelques heures, les estivants en vacances à Valras, Sérignan, Vendres et autres stations balnéaires voisines. La feria profite de l’afflux touristique estival. Elle ne le crée pas.
9- IMPACT REEL SUR LE COMMERCE LOCAL
La feria, une manne pour l’économie biterroise ? La réalité est tout autre.
Les hôtels de Béziers et des environs, pleins en août, n’ont pas besoin de feria pour être saturés.
Les cafetiers, les restaurateurs, les débitants de tabac et de cartes postales ? Seuls ceux des rues en fête prospèrent pendant la feria. Ceux des autres quartiers n’y gagnent rien et perdent même une bonne partie de leurs clients habituels au profit de leurs concurrents du centre.
La plupart des commerces (vêtements, chaussures, ameublement, agences immobilières, etc) même dans le centre ville, ont nettement moins de clients pendant la feria qu’en dehors d’elle, ne serait-ce qu’à cause de l’impossibilité pour les acheteurs de circuler et de stationner. Cette raison ajoutée à l’insécurité provoquée par la feria explique que beaucoup choisissent carrément de fermer boutique pendant ces 4 ou 5 jours. En 2006 le COLBAC a dressé la liste des boutiques fermées dans les rues en fête. Nous avons compté 114 commerces fermés à cause de la feria.
Qu’est-ce qui nous autorise à écrire « à cause de la feria » ? Nous avons pris en compte d’abord les boutiques dont la devanture portait l’inscription : « Fermé pendant ou en raison de la feria ». Nous avons compté ensuite les commerces dont les congés se limitaient aux 5 jours de feria (du 11 au 15 août cette année-là). Nous avons compté aussi les boutiques dont les congés commençaient le 11 août ou finissaient le 15 août et qui donc avaient choisi le début ou la fin de leurs congés pour éviter la feria. Enfin nous avons pris en compte les quelques commerçants (une dizaine) qui annonçaient sur leur devanture que, pendant ces 5 jours, ils fermeraient boutique plus tôt que d’habitude (dès 17 h ou même dès 16h pour certains) pour échapper aux heures de feria. Même le sex shop de la rue Victor Hugo fermait très tôt pour ne pas s’exposer aux dérapages des fêtards.
A ces 114 commerces, il faut ajouter le grand marché forain du vendredi (de 200 à 300 commerçants) et le marché paysan du samedi tous deux supprimés pour faire place à la feria.
Reste le cas des grossistes qui alimentent les bodegas et casitas en alcool, riz, crevettes, viande, charcuterie, etc. Ce n’est pas à Béziers que ces gros distributeurs achètent leur marchandise. Ils pompent au contraire l’argent de Béziers et ne le réinvestissent pas à Béziers. Est-ce que du moins ces grossistes profitent de la feria ? Même pas : que les estivants de Valras consomment, le soir, à la feria de Béziers ou dans les restaurants de Valras, cela ne change rien au chiffre d’affaires des grossistes qui fournissent à la fois Béziers et Valras.
La feria profite à une petite minorité de commerces situés dans le centre en fête mais nuit globalement à tous les autres.
Contrairement à ce que nous répète la propagande officielle, la feria est seulement conçue pour attirer du monde aux arènes et ne stimule pas l’économie locale.
Pour satisfaire les intérêts de la toromafia,
on sacrifie l’économie locale.
Les métropoles méridionales (Bordeaux, Toulouse, Marseille, etc) ont toutes été autrefois des villes taurines. Mais au milieu du 20ème siècle toutes ont rejeté la tauromachie. Les grandes cités dynamiques et prospères, même en Espagne, méprisent les spectacles taurins. Le conseil municipal de Barcelone demande leur abolition. Nos voisines Montpellier et Narbonne, dont le dynamisme est envié, ne veulent pas entendre parler de corridas. Seules des communes en déclin économique s’accrochent encore à la tauromachie qui passait jadis pour un appât touristique. L’expérience a prouvé le contraire. En juillet, mois où les touristes sont nombreux, disponibles et demandeurs d’attractions, il a fallu, en 1998, mettre fin aux corridas biterroises parce qu’elles attiraient de moins en moins de public.
Pour les observateurs économiques, le maintien de la tradition taurine est le révélateur d’une économie malade, gérée par des hommes dépassés. En particulier l’image repoussante que la feria donne de Béziers et des Biterrois n’a pas de quoi séduire des investisseurs.
CONCLUSION
La feria, pour attirer des spectateurs aux corridas, exalte l’Espagne au détriment de l’Occitanie, la culture ibérique au détriment de la culture occitane, les vins et produits espagnols au détriment des nôtres.
Montées pour imiter Séville, les casitas donnent une image déplorable de Béziers par leur saleté, leur tapage et en poussant à l’ébriété avec toutes les dérives comportementales que l’alcool engendre.
Ce qui est réprimé en temps ordinaire (stationnement sur les trottoirs, incitation à la consommation d’alcool, ivresse publique, tapage nocturne, bagarres, violences, transgressions sexuelles, pisser et chier dans la rue, conduire en état d’ivresse) est toléré pendant la feria : Les pouvoirs publics, complices, ne font rien pour réduire l’abus d’alcool, le tapage nocturne, la saleté et les violences afin de ne pas nuire au lucratif commerce de la défonce. Le tiroir-caisse des trafiquants d’hémoglobine, de décibels et d’alcool passe avant le droit des habitants au repos, avant l’hygiène publique, avant la sécurité des citoyens, avant la sécurité routière, avant la réputation de Béziers.
Insupportable pour la plupart des Biterrois, la feria nuit globalement à l’économie locale.
Pourquoi les politiciens, les milieux d’affaires et les medias, pour la plupart, soutiennent-ils néanmoins ferias et corridas ? Parce que, sans feria, les corridas, privées de public, seraient condamnées à disparaître. Or politiciens, journalistes et affairistes, friands de relations mutuelles et de contacts multiples, tiennent à la fête taurine, un cadre où ils peuvent se rencontrer tous, faire d’innombrables et utiles connaissances, échanger de multiples informations, négocier de nombreux accords, faire une publicité massive pour leurs produits (pastis Ricard, vins, Midi libre, etc.) nouer des complicités et pratiquer le trafic d’influence. L’immense brassage de la feria favorise tous les rapprochements, même les plus inattendus. La fête, la musique et l’alcool mettent de l’huile dans les rouages de toutes les négociations. La lyonnaise des eaux, le Midi libre et autres entreprises d’envergure disposent aux arènes d’une loge où chacun invite les partenaires avec qui il est en affaires avant de les mener dîner dans une bodega de choix ou au village équestre. Une minorité influente, de façon mafieuse, impose sa feria taurine contre l’intérêt général de Béziers et des Biterrois.