L’Union Taurine Biterroise, le plus ancien, le plus connu et le plus riche de tous les clubs taurins biterrois est en pleine tourmente.
On s’y dispute férocement le pouvoir. Pourquoi ?
Qu’est-ce donc qu’un club taurin et quel rôle joue-t-il ?
Détrompez-vous : ce n’est pas une association d’amoureux du toreo. D’après le chroniqueur taurin Pierre Albert Blain, les aficionados de verdad, sincèrement épris de tauromachie, ne sont pas plus de cinq mille dans toute la France. Ils sont donc très minoritaires même dans les clubs taurins. Nombreux en revanche dans ces clubs sont les hommes d’affaires, les politiciens, les journalistes et les snobs.
Les snobs, à qui les media répètent que les boucheries charcuteries des corridas sont hautement artistiques et culturelles, croient que pour appartenir à la « bonne » société, il faut fréquenter les soirées, les cocktails, les dîners, les nuits de gala et autres réunions mondaines des clubs taurins.
Pour les politiciens, les journalistes et les affairistes, les clubs taurins sont des lieux de rencontre où on peut facilement se faire d’utiles et nombreuses relations et pratiquer le trafic d’influence. Mais les trafics des uns se heurtent vite aux prés carrés des autres. D’où les conflits de pouvoir qui déchirent ces réseaux et y provoquent des scissions.
L’impopularité croissante de la corrida incite les notables les plus lucides à prendre leurs distances avec le milieu taurin. Il y a quelques années, les vedettes de la politique et du show business, qui s’affichaient naguère si complaisamment, pour faire leur pub, au premier rang des arènes ou dans le callejon, ont brusquement déserté les corridas. Frappé de cette désertion si soudaine, le Midi libre lui a consacré un article intitulé « Que sont les people devenus ? ». Au même moment, les commerçants du centre ville biterrois, sentant eux aussi le vent tourner, ont cessé de décorer leurs vitrines, à l’approche de la feria, avec des muletas, des banderilles et autres objets taurins. Même les politiciens ont commencé à retourner leur veste. On trouve aujourd’hui des parlementaires qui s’affichent anticorrida même dans le Gard !! C’était impensable il y a dix ans. On attend en frétillant de curiosité le moment où le député de Béziers Elie Aboud jugera prudent de changer de camp et de faire amende honorable, suivi longtemps après par le sénateur maire Raymond Couderc, dont la colonne vertébrale est notoirement moins souple.
Le succès favorise l’union. En revanche, quand le bateau coule, les dissensions explosent, chacun accusant l’autre d’avoir mal tenu le gouvernail. Les clubs taurins sont condamnés à la montée des dissensions et des scissions.